Les origines du Thinking Day

Journée Mondiale de la Pensée

Nous avons déniché cet article dans la revue "Guide de France" n°196 de février 1946. Il décrit parfaitement l’esprit et l’origine de la Journée de la Pensée chez les Guides de France, journée qui avait un sens bien plus important qu’une journée mondiale du scoutisme et du guidisme telle que pratiquée aujourd’hui.

Nous avons converti l’article de la revue numérisée tel quel. Pour te remettre dans le contexte, il a été écrit en 1946. C’est à dire moins d’un an après l’armistice de la Seconde Guerre Mondiale. Et à une période où en France, la vie quotidienne était encore difficile. Les tickets de rationnement étaient encore en vigueur.

"Si toutes les filles du monde voulaient se donner la main, alors on pourrait faire une ronde autour du monde !" Paul Fort

La terre est ronde, disait déjà Galilée.
 Connais tu sa circonférence ?
 40 000 kilomètres !

Il en faudrait des filles, il en faudrait des mains qui se joignent, pour faire tourner, autour du monde, cette grande ronde que chante le poète dans sa ballade !

Et pourtant, s’il est une ronde de toutes les filles du monde, n’est-elle pas déjà préfigurée par notre chaîne du guidisme international ?

N’es-tu pas un maillon de cette chaîne ? N’es-tu pas l’une de ces filles dont les deux mains en joignent deux autres, et les autres joignant les autres ; miracle du geste multiplié qui nous répète et nous fait une !

N’avons-nous pas, tant de fois déjà, autour d’un feu qui s’éteint, lié nos mains à celles de nos soeurs pour former la chaîne des adieux ?

As-tu imaginé la chaîne que feraient, reliées, toutes nos chaînes ? As-tu pensé à la belle ronde que l’on pourrait faire, rien qu’avec toutes les filles qui sont sous le signe du trèfle ?

As-tu pensé que ta promesse t’a reliée, dans notre fraternité, à l’amitié de toutes les guides ?

« ... Et la soeur de toute autre guide » (pas seulement « guide de France » !).

As-tu pensé que notre fraternité ne s’arrête ni à notre association, ni à nos frontières, mais qu’elle est ce grand lien international, dont Lord et Lady Baden-Powell n’ont cessé, dans leurs messages, de nous apprendre (suprême technique !) à le tisser toujours plus serré.

Afin de nous unir plus étroitement dans la pensée de toutes les éclaireuses et guides du monde, un jour spécial a été dédié à l’amitié internationale, c’est le Thinking Day : le jour de pensée internationale.

 Sais-tu pourquoi l’on a choisi la date du 22 février ?
 Parce que c’est le jour anniversaire de Lord et Lady B.-P.
 Qui a institué le 22 février ?
 Alors, attends, je vais te le dire ...

Un peu d’histoire.

C’est en 1919 que Lady B.-P., pour répondre à toutes les missives venant de tous les pays, créa un Comité international destiné à servir d’agent de liaison.

Dès 1920, des cheftaines de tous les pays inaugurent, à Cambridge, le premier des congrès internationaux, qui, tous les deux ans, vont planter leurs tentes de Foxlease à Genève, d’Amérique en Hongrie (la règle du jeu consistant à changer à chaque rencontre, de Pays).

En 1926, lors d’un congrès en Amérique, les cheftaines réunies, pour consolider les liens de l’amitié internationale, demandent que soit créée une organisation mondiale. Elle est définitivement instaurée en 1928, lors du Congrès international de Hongrie, en Association mondiale, à laquelle adhèrent les associations de tous les pays.

C’est en 1932 que l’Association mondiale institue le Thinking Day, jour de pensée internationale.

Toutes les éclaireuses du monde sont invitées à y participer, d’abord en union de pensée : « en s’unissant par la pensée aux éclaireuses de tous les pays » , puis en un geste de solidarité : « les éclaireuses contribueront, par un modeste don, volontaire, à aider au progrès du mouvement ».

L’association mondiale a son secrétariat permanent : le bureau mondial, à Londres, dont la directrice est Mrs. Leigh-White (qui accompagnait Lady B.-P. lors de son récent voyage).

Un congrès international se réunit en conférence mondiale tous les deux ans.
Dans l’intervalle, c’est le Comité mondial (dont notre chef-guide est pré-sidente) qui prend les décisions.

On ne saurait parler de l’Association mondiale et des amitiés internationales sans évoquer Notre Chalet, dont Lady B.-P., elle-même, ouvrit, en 1932, les portes à toutes les éclaireuses du monde. Une Américaine, Mrs. Storrow, en fit don « pour l’avancement du guidisme et la bonne volonté entre les nations ». Là-haut, au cœur des montagnes suisses, à Adelboden, il est un foyer très rayonnant ; où se nouent les plus fraternelles amitiés internationales, grâce surtout à son animatrice : Falk, dont le nom est devenu le ralliement de toutes les guides et éclaireuses de par le monde. (Mais il faudrait consacrer un chapitre spécial pour parler de « Notre Chalet ».)

Les dernières rencontres internationales eurent lieu, en 1938, à Adelboden, pour le Comité mondial.

En 1939, le grand camp de Carledis, en Hongrie, fut le dernier grand rassemblement de toutes les guides et éclaireuses.

Une réunion du Comité mondial vient de se tenir, à Genève, pour préparer la prochaine conférence mondiale, qui est prévue, en France, pour septembre 1946.

Mais, l’histoire, ce n’est pas seulement le passé, c’est aussi le présent, c’est surtout demain. C’est à nous qu’il appartient, aujourd’hui, d’écrire l’histoire du Mouvement.

Si la guerre avait interrompu les rencontres, elle n’avait pu briser l’union ni la fraternité. Déjà se renouent les rencontres : le grand voyage de Lady B-P, ce printemps, portant son message à toutes les guides et éclaireuses, n’était-il pas le premier « signe de piste » officiel qui nous ouvrait, à nouveau, tous les chemins de l’amitié internationale ? Chemins et carrefours où nous avons déjà mêlé nos fanions à ceux de nos soeurs de Suisse, d’Angleterre, de Belgique... hors de nos frontières et sur notre sol.

En attendant de participer au grand jamboree qui réunira, en 1947, toutes les associations scoutes chez nous, comment mieux nous y préparer qu’en prenant conscience de notre richesse, de notre patrimoine vivant, qu’en participant à la fraternité internationale ?

Comment ?

Pensez à célébrer la journée du 22 février :

Par l’union de pensée ;

Par le geste de solidarité.

Par l’union de pensée

Mettre à l’honneur la pensée inter-nationale :

  • En apprenant un ou plusieurs chants scouts d’un autre pays (de langue française ou étrangère), 2 recueils en français : De tous les coins du monde, à la F. F. E. (en petit nombre) et Chantons les vieilles chansons d’Europe, éditions Ouvrières, avenue de la Sœur-Rosalie, Paris ;
  • En apprenant le chant international : Le Trèfle d’or de notre drapeau ;
  • En faisant un grand jeu (ou jeu d’intérieur) géographique ou historique international ;
  • En échangeant une lettre d’équipe, ou de compagnie, avec une équipe ou compagnie d’un autre pays (ayant, par exemple, comme objet précis l’envoi mutuel d’un chant) ;
  • En préparant une veillée de lectures et de chants internationaux (disques) ;
  • Surtout en vous documentant sur les autres pays ;
  • En étudiant le programme des compagnies guides « d’amitié internationale » créées sur l’appel lancé, dès 1944, par Lady B.-P.

Par le geste de solidarité ou les 20 sous du 22 février

[En 1947, 20 sous formaient un franc, ancien, c’est une expression pour la pièce de 5 centimes, à l’époque la plus petite - NDLR]

L’Association mondiale a demandé à toutes une participation volontaire, destinée à créer un fonds international.
Plus que jamais, le fonds international a besoin de la contribution généreuse de toutes les associations pour venir en aide aux pays, où, pour renaître, du moins matériellement, le guidisme doit vraiment « repartir ».

Nous apprenons, par Le Trèfle rouge et blanc (bulletin d’août de la Fédération des éclaireuses Suisses), des nouvelles de Hollande : « Nous ne possédons plus rien, tout a été volé, l’argent ... Mais c’est bien difficile de travailler quand on n’a pas même une salle convenable pour organiser un jeu ... »

Le même Trèfle (numéro d’octobre) publie ces nouvelles de Tchécoslovaquie : « Vous pouvez difficilement imaginer les difficultés que nous avons à combattre. Tous nos livres ont été détruits, notre matériel volé. Nous copions à la machine nos manuels, car les bibliothèques particulières ont été aussi pillées. »

Bien qu’incomplet l’effort de la France a été, l’année dernière, très apprécié par les pays victorieux et amis, touchés de voir que les Françaises ne se contentent pas de recevoir, mais pensent aussi à l’aide à apporter à la reprise du guidisme.

Cette année, notre geste doit être plus généreux.

Appel

Notre Association, tout en marquant le caractère facultatif de la participation, lance un pressant appel à toutes et invite chacune à donner les vingt sous du 22 février.
Tous les vingt sous récoltés dans ta compagnie donneront un manuel à une section de Prague ...
Tous les vingt sous de ton district garniront les rayons d’une bibliothèque à Budapest...
Tous les vingt sous de la province remettront debout un local pour ce groupe de Varsovie...
Elles ont besoin de livres à Helsinski... Elles ont besoin de livres à Kovno, à Memel...
Elles n’ont plus de local à Tallien, à Riga ...
Elles n’ont plus de mobilier à La Haye ...

N’entends-tu pas leur appel ?
Ne sens-tu pas leur attente ?
Toi,
qui as encore un local, ton coin si cher, tes livres, tes manuels !
« Si toutes les filles du monde voulaient se donner la main... »

Donne-leur la main.
Donne-leur ta pensée fraternelle. Donne-leur ton aide.
Et, avec elles, entre dans la grande ronde joyeuse de notre fraternité retrouvée.

SOLDANELLE

Pratiquement : Les dons des Unités seront réunis aux districts. Et les districts voudront bien les envoyer directement à la Cheftaine de Beaulieu, commissaire internationale [adresse dans Paris XVI plus d’actualité - NDLR]. Envoyez les collectes par mandats.

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