Le doyen des Scouts et Guides de France nous a quitté

Daniel PETIT est décédé le 31 décembre 2016

Résistant à Nancy en 1944, membre d’honneur des Scouts et Guides de France depuis 2013, Daniel PETIT est décédé ce 31 décembre 2016. A 96 ans, il était toujours scout ! Hommage.

Daniel PETIT est né en 1922. Il entre aux louveteaux? à 8 ans, en 1930. Comme beaucoup d’entre nous, il s’est "fait avoir" par un copain à lui, le fils du pharmacien. Lui-même s’était fait avoir par le préparateur de la pharmacie, qui était chef scout. Ah ah ! La contagion :)

Pourtant son engagement n’a pas été très bien vu. Daniel PETIT raconte :

Mes tantes et oncles répétaient que mon père m’avait mis chez les scouts le dimanche pour pouvoir aller à la chasse

Mais il aime ça. En 2014, il raconte :

Lorsque je suis entré à la Meute en 1930, je ne me suis pas douté qu’en 3 mots je recevais pour toute ma vie une réponse à mes incertitudes, une règle, un repère : “ de mon mieux ”.

En 1934 il monte aux scouts. Il suit son petit bonhomme de chemin puis devient chef de troupe Scouts de France de la XIIème Nancy en 1940.

En 1944, il résiste à l’occupant allemand avec la Haute Patrouille de Nancy. Michel Payen, ancien président du Scoutisme Français raconte sur le Cercle Scout :

Engagé chef routier à Nancy en pleine guerre, alors que le scoutisme était interdit, il crée avec ses routiers? le réseau de résistance Mafeking spécialisé dans la collecte de renseignement. Avec audace, ils ont relevé des positions militaires allemandes, dérobés des plans dans des QG.... Il a risqué sa peau plusieurs fois. Pierre Joubert a fait un dessin de son arrestation par les allemands (la patrouille du Pélican).

Nous te reproduisons le récit des actions de cette Haute Patrouille paru dans la revue SCOUT d’avril 1946, un récit haletant que nous te recommandons chaleureusement :

Lire aussi :

Scout à Nancy en été 1944

Cet article a été retrouvé sur l’Espace de Mémoire Lorrain. Nous trouvons important de le reproduire ici, pour le rendre visible à tous les (…)

En 1950, Daniel arrête le scoutisme : mariage, papa de deux enfants, chirurgien dentiste. Ça devenait compliqué ! Il revient en 1990 après le décès de son épouse.

Amusé, il raconte :

Membre honoraire, membre donateur, ancien d’un mouvement de jeunesse, d’accord ! Mais membre actif à 90 ans de ce même mouvement ressemble à un gag et c’est pourtant possible. Il suffit de ne jamais dire : « De mon temps ». De croire et vivre les valeurs qui sont propres à ce mouvement et trouver le bon créneau pour le servir selon ses aptitudes, sans s’imposer, sans rien attendre en échange.

Et servir, il ne le fera pas à moitié. Il s’investit dans le musée national du scoutisme, au château de Thorey-Lyautey, puis crée le centre de documentation et d’archives de Bainville. Le travail de mémoire est quelque chose auquel il tient fort (cf son interview plus loin).

L’Est Républicain raconte ensuite, en janvier 2013 :

Dans sa longue vie de scout, il a connu des garçons qui sont devenus profs de fac, médecins, directeurs de grandes écoles, à l’image d’un ancien directeur de l’école des Mines. Il y a croisé aussi des futurs polytechniciens, prêtres et prélats, « mais aussi des jardiniers, des ajusteurs, des gens simples ». Sans oublier un ministre : Jacques Chérèque. « Il n’aime pas que l’on en parle, mais il ne désavoue pas ».

Hasard de date, Jacques CHEREQUE est le père de François CHEREQUE ancien scout aussi, qui nous quitte 3 jours après Daniel PETIT ce 2 janvier 2017.

Tous gardent leur scoutisme comme éthique. Des valeurs d’ouverture sur soi, de goût de l’effort, de générosité, de fidélité, d’amitié, de joie de vivre, que Daniel Petit a même décelés dans l’émission Kho-Lanta qu’il regarde « parfois », pour ne pas dire tous les vendredis. « Le reflet de la société actuelle, dit-il, où l’on supprime les meilleurs pour rester coûte que coûte ». Pourtant, à plusieurs reprises, « pour expliquer ses choix, ses performances, la qualité de sa participation, l’un des compétiteurs, relève encore Daniel Petit, a simplement répondu qu’il ne faisait que respecter les valeurs que lui avait apportées le scoutisme ». Un esprit partagé par le doyen des jeunes scouts de France. Si ça ne tenait qu’à lui, d’ailleurs, il irait à Kho-Lanta pour montrer qu’à n’importe quel âge, même à 90 ans, on peut être un boy-scout sur qui on peut toujours compter.

Alors qu’il refuse tous les honneurs pour ses actions, malgré les propositions entre autres du Général De Gaulle, en 2013, Daniel PETIT accepte de devenir membre d’honneur des Scouts et Guides de France.

Brassard de FFI de Daniel PETIT

Au revoir Daniel.

Interview de Daniel PETIT

Nous nous permettons de reproduire une interview de Daniel, réalisée pour l’opération Scout Un Jour Scout Toujours des Scouts et Guides de France.

Daniel, comment expliques-tu cette longévité dans le scoutisme ?

Effectivement, à 92 ans [96 ans en 2016 - NDLR], après une longue parenthèse familiale et professionnelle, je me retrouve tout à la fois, Membre d’Honneur des SGDF?, et surtout membre actif de l’équipe territoriale de Lorraine, après avoir oeuvré pour le Musée du Scoutisme de Thorey et créé le Centre de documentation de Bainville.

En quoi ton passé scout t’a-t-il amené à t’intéresser à la sauvegarde de la mémoire du scoutisme, tant au niveau local que national ?

Peut-être, parce que j’ai côtoyé dans ma jeunesse des garçons de tous milieux, qui plus tard avaient tous gardé de leur scoutisme une éthique, avec des valeurs d’ouverture de soi, de goût de l’effort, de générosité, de fidélité, d’amitié et de joie de vivre.
Mais aussi parfois, J’ai été le témoin du sacrifice de camarades durant la guerre, alors je me suis fais un devoir de retracer leur vie et leurs actes héroïques, dans une série de portraits évoquant la "crédibilité du scoutisme" à travers leurs exemples.

Cette action de mémoire semble importante à tes yeux, quels en sont les divers aspects ?

Déjà, ma simple présence "d’ancien" au milieu des jeunes est en elle-même un témoignage fort. En effet, le scoutisme est porteur de valeurs qui traversent le temps et les générations.

Pour moi, l’avenir ne peut se bâtir que sur un socle solide , constitué par toute la multitude de celles et ceux qui nous ont précédés et transmis leur expérience et leur savoir faire.

PS

Sources :

Publié le (mis à jour le )